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Le site du Groupe belge d’Education nouvelle.

Casse-cou
Article mis en ligne le 25 avril 2016

par Charles Pepinster

Le Pacte d’Excellence impulsé par Madame la Ministre de l’enseignement dans une partie de la Belgique prévoit, dans les avis de son « Groupe Central » du 01/07/15, de :
(1) Développer un nouveau rapport au savoir, des compétences citoyennes nécessaires au vivre-ensemble, l’éducation à la créativité et à la culture, ouvrir sur le monde, initier à la pensée critique et complexe, concilier différenciation et hétérogénéité, rendre l’enfant autonome et responsable, dépasser la logique purement académique et disciplinaire…
Tout cela est très beau et bon, qui ne peut y adhérer en pensée ? Personne.
Mais qui peut mettre tout cela en pratique ?

Très peu de professeurs car ce château de cartes joliettes s’écroule, patatras, sous le souffle du démon NOTATION que les mêmes bonnes âmes, qui viennent de nous charmer de leur chant de sirène, appellent de leurs vœux, ainsi :
(2) Le renforcement des évaluations externes (p. 43) est identifié comme l’un des éléments de gouvernance permettant d’assurer l’amélioration de la qualité de l’enseignement. NB. Ces « épreuves » (sic) sont payantes,… avec une fausse monnaie, des points.

C’est faux car ces évaluations externes certificatives chiffrées, en particulier pour le CEB*, valident, renforcent même les examens internes, ceux des profs avant chaque congé, eux aussi chiffrés ‘au pif’ ainsi que les interros parfois journalières. Ceci donne le ton à tout l’enseignement : les élèves s’habituent à travailler pour des points et non pas pour la saveur du savoir ; le bachotage devient monnaie courante**. Là, le professeur stigmatise et dénonce aux parents les erreurs… ce qui ruine la confiance entre ses élèves et lui. En revanche, sans menace, dans un climat de bienveillance, sans donc le chantage des notes/Viagra, les élèves osent des solutions créatives et solidaires où l’erreur est validée ; ils disent eux-mêmes, sans peur, ce qu’ils n’ont pas compris, loin des interros inquiétantes sensées débusquer les manques légitimement camouflés.

C’est vrai, je l’ai vécu comme le montre « Un tableau noir dans la cuisine »
Les écoliers sont des êtres sensibles, vite submergés par les émotions. La peur des sanctions et des humiliations entrave leur naturelle envie d’apprendre.
En outre, les effets toxiques des évaluations externes, lourdement chiffrées arbitrairement, sont considérables car celles-ci soumettent les enseignants à une injonction paradoxale : émanciper (1) et préparer aux épreuves externes, parfois certificatives, antinomiques (2) où les élèves sont seuls, devant des questions scolaires écrites venues d’ailleurs, apeurés car menacés d’échec ou de dévalorisation, où s’entraider est interdit, sanctionné même et où les professeurs sont écartés car soupçonnés de pouvoir aider leurs élèves à la dérive, donc de désobéir. Place aux experts qui, eux, savent ce que chaque élève doit répondre pour ‘réussir’.

On peut très bien sonder le niveau de compétence des élèves SANS le tarifer, sans pour autant ‘marchandiser’ le savoir. Non à l’école bancaire induite par les épreuves externes ‘payées’ qui coûtent cher et finissent toujours par des tricheries à réprimer autoritairement.

Le Bac napoléonien de nos amis français, monumental examen externe, révèle chaque année des irrégularités suivies d’un resserrage des boulons… toujours contourné ce qui fait intervenir le pénal à l’école.
« Fuyez les mauvais compagnons », « Ne suivez pas les mauvais exemples », nous apprenait-on à l’école et à la maison donc, n’imitons pas l’hexagonale centralisation.

Bref, casse-cou !

**Une presse ‘intéressée’ a créé des aides au bachotage inattendues : les parents, par elle munis des questionnaires des années passées. La tension devant les examens externes envahit donc les familles ; de quel droit ? Les inégalités sociales accentuent ainsi les inégalités scolaires.

Proposition constructive

Un paragraphe (3) remplacerait le (2) :
(3) Afin d’assurer l’amélioration de la qualité de l’enseignement, l’usage du porfolio sera préconisé, le chef-d’œuvre pédagogique** constituera la preuve (et non l’épreuve) de l’acquisition des compétences autant pour les élèves en obligation scolaire que pour les adultes en alphabétisation et les détenus déjà diplômés depuis le 3 mai 1999 après la présentation réussie de cette preuve de compétences citoyennes, d’éducation à la créativité et à la culture, d’ouverture sur le monde, d’initiation à la pensée critique et complexe en rendant l’élève autonome et responsable capable de dépasser la logique purement académique et scolaire (1).
Ceci est en harmonie avec le Décret Missions de l’enseignement du 24/07/1997, avec la liberté des méthodes assurée à chaque Pouvoir Organisateur par le Pacte scolaire du 29 mai 1959… pas l’examen externe.
Ainsi donc, autant (1) et (2) sont antagonistes, autant une cohérence forte est établie ente (1) et (3).

** le chef-d’œuvre pédagogique, décrit dans ce site, est vécu dans de plus en plus d’écoles dont une pionnière à Buzet – Floreffe, depuis 24 ans ; celle-ci a reçu le Prix de la Reine Paola en 1996.
 L’UNESCO a récompensé un collectif d’alphabétisation bruxellois pour son usage.
 Les professeurs Pourtois et Desmet de l’Université de Mons décrivent la pédagogie du chef-d’œuvre, dont je suis l’auteur, dans leur livre : « Education postmoderne » ( PUF).
 Le professeur Jean Houssaye de l’Université de Rennes, reconnu comme expert de l’Histoire de la Pédagogie, cite le chef-d’œuvre pédagogique dans son livre : « Pédagogues de demain » (Fabert).
Les moteurs de recherche comme Google fournissent de larges explications à propos de cette pratique pédagogique innovante peu à peu reconnue pour sa cohérence.
Cette pratique est exaltante comme l’ont montré six mémoires universitaires, mais elle est encore trop neuve pour être connue par de nombreux pédagogues.
On peut comprendre que le « Groupe Central » du Pacte d’Excellence s’accroche aux épreuves externes n’étant guère au fait, n’ayant jamais vécu, d’alternative solide.

Un éclairage utile survient en comparant deux modes d’évaluation certificative (fin du primaire belge)

En conclusion 
50 différences d’ordre pédagogique, psychologique, sociologique,
philosophique donc politique apparaissent - ici de façon dichotomique - entre deux manières d’envisager l’Education du Futur, de définir un Pacte d’Excellence d’avenir débarrassé des scories du passé.

NB. La Maison des Enfants à Buzet, école communale de Floreffe, fait ‘portes ouvertes’ toute l’année, donc Madame la Ministre peut y recevoir un bel accueil organisé par les élèves. Tél. 081- 45 01 80.

Voir aussi : www.lamaisondesenfants.be et www.panote.org

*Certificat d’Etudes de Base à la fin de l’école primaire en Belgique.