– "Est-ce donc vraiment une intention pédagogique et altruiste qui les anime ?"
– "Quels sont les mauvais parents qui oseraient éviter cette aide providentielle ?"
– "Quelle est la posture pédagogique véhiculée par ces publications ?"
Ce qui est vraiment interpellant, c’est la posture médiatique qui semble être complètement démunie du minimum de sens critique et éthique. Si leur discours devait être pris pour argent comptant, cette Epreuve Externe Obligatoire (qu’ils confondent avec le Certificat d’Etude de Base, délivré par une commission interne liée à chaque pouvoir organisateur) serait unanimement acceptée, partagée, voire vouée au rang de mérite régional.
A notre tour de questionner ce qu’il y a au-delà des médias.
– N’y a-t-il pas une intention de profit et volonté de leurre par la position dans laquelle ils mettent le lecteur dès lors qu’ils s’inspirent largement d’éditeurs scolaires ciblés ?
– Qui sont-ils pour soutenir et orienter une politique éducative en insistant sur la compétition et en favorisant le stress parental et, ce faisant, juvénile ?
– Quelle est la part d’objectivité d’un média qui ne présente que cette conception, unique et univoque, de la finalité de l’enseignement fondamental ?
Nous affirmons que nombre d’acteurs de l’éducation (parents, enseignants, éducateurs, chercheurs) critiquent cette épreuve tout autant que le relais médiatique qui lui est accordé.
Globalement, nous pensons que le transfert de l’activité scolaire dans le champ familial n’est pas sain ; ni pour l’enfant, ni pour les parents, ni pour les enseignants eux-mêmes.
– Les repères affectifs que se construit chaque enfant sont mis à l’épreuve dès lors que ses propres parents deviennent « enseignants ». Les questionnements hors du contexte scolaire perturbent la plupart des enfants. Ils risquent, voulant montrer le meilleur d’eux-mêmes, d’être déforcés voire discrédités aux yeux des personnes qui représentent les repères identitaires. Le conflit de loyauté se profile.
– Les repères scolaires des parents, construits essentiellement par leurs vécus respectifs, viennent percuter les réalités pédagogiques contemporaines. Ces dernières s’ancrent dans un réel fait d’incertitudes, de questions de « vivre ensemble » fondamentales, de défis planétaires, d’évolutions sociétales et identitaires qui nous étaient inconnues il y encore peu de temps. Le conflit de génération guette.
– Le crédit à accorder au métier d’enseignant s’amenuise dès lors que ces derniers acceptent que des profanes s’emparent de leur profession. L’école n’est-elle pas l’endroit le plus adéquat pour y effectuer des apprentissages avec l’aide de professionnels de la pédagogie ? Le conflit de notoriété est installé.
Par ailleurs, nous pensons que jamais une épreuve standardisée ne pourra être pensée dans la perspective d’évaluer la capacité d’un enfant à prendre sa vie en main dans la suite de sa scolarité.
Nous ajoutons qu’au-delà de la scolarité, l’école doit en tout premier lieu utiliser sa structure pour favoriser chez chaque élève l’apparition d’une personnalité riche, complexe, tenace, critique ET solidaire. Voilà une perspective qui nous éloigne de loin de la pauvre image que les médias donnent actuellement du rôle que les instituteurs sont sensés tenir. Notre société qui a bien besoin d’autres repères que ceux légués par le modernisme de la fin de XIX siècle !
PS : pour l’heure, des Chefs-d’oeuvre pédagogiques ont été présentés dans nos écoles respectives. Ils étaient stupéfiants de vitalité enfantine, d’initiatives individuelles, de plaisirs partagés, de connaissances complexes.
Mais cela, ce ne sera pas relayé dans la presse ! Il faudrait d’abord qu’elle quitte le sens commun et s’accorde un peu plus de curiosité qui, si elle en usait, ne serait pas un vilain défaut !
L.Guillaume et J-F Manil
Instituteurs – Docteurs en Sciences de l’Education
Mai 2015